Ciel gris ~ PV William Sullivan /TERMINE/

Il avait besoin d’air, cela faisait déjà bien trop longtemps qu’il ne cessait de faire des allers-retours de son appartement au Centre sans jamais avoir le temps de se poser un peu. La situation de ces derniers jours semblait critique, le Centre était en ébullition. Depuis ce jour funeste, William n’était pas reparti à la rencontre de nouveau mutant. Ayant comme signalé un état d’urgence interne, la sécurité au Centre avait été augmentée et les dirigeants avaient décrété que plus aucun agent du Centre ne devait aller sur le terrain seul, de ce fait le jeune homme n’avait pas encore accepté la moindre mission. Mais s’en était trop…
Le message de Janis avait été le bienvenu, il profita de cette excuse pour sortir du Centre et parti à la rencontre de la jeune femme. Central Park, connaissant la douce folie de la jeune femme concernant les lieux de rencontre, il s’en étonna quelque peu, il s’attendait plus à un bar, une salle de billard ou tout autre lieu où le calme et le silence n’étaient pas les bienvenues. En soi il appréciait l’endroit, mais après ces derniers ils auraient bien eu besoin d’un remontant alcoolisé. Mais soit ce serait pour autre fois.

Tout en marchant dans le parc il repensait aux sinistres évènements, tout d’abord la mort de la jeune fille, il ne l’a connaissait pas, ce n’était pas lui qui l’avait recruté, mais cela faisait un choc tout de même. Savoir qu’une organisation voulait la disparition des mutants était des plus troublants. L’existence des mutants étant gardée secrète dans le monde entier, seuls les dirigeants de quelques pays étaient au courant de l’existence du Centre, ce qui réduisait le champ de suspect drastiquement, mais des fuites étaient possibles. Qu’ils soient vus comme des monstres, cela William pouvait le comprendre, mais que l’on veuille leur mort c’était inimaginable.
Quelque peu sur les nerfs, William semble sur ses gardes, jetant sans arrêt des corps d’œil un peu partout, s’attendant à voir un homme masqué armé le visant de son arme. Mais il savait qu’il était en sécurité, enfin une sécurité relative certaine, mais quel pouvait être les chances que des mutants se fasse attaqué en plein milieu de Central Park là où des centaines de personnes se trouvaient chaque jour. Et puis pourquoi il s’inquiétait ? Il oubliait parfois, mais il avait des capacités contre lesquels même un homme armé ne pouvait rien faire.

Il arriva enfin près de la fontaine que lui avait indiquée Janis, habitué à ses retards, il ne s’attendait pas à la voir là. Un sourire aux lèvres, le jeune homme s’approcha d’elle, elle le vit bien avant qu’il n’arrive à son niveau. Elle s’enquit de savoir comment il allait, mais William comprit ce qu’elle voulait vraiment savoir. Oui il avait été occupé, comme tous les agents du Centre, mais il ne savait pas vraiment ce qu’il pouvait dire. Il ne voulait pas l’inquiéter et pour tout dire il n’avait pas vraiment envie de parler de tout ça.

« Eh bien, ça va bien. » Un soupira légèrement, la réponse n’était pas tout à fait vraie, il était totalement épuisé, mais il n’en parla pas. « Oui, j’ai été pas mal occupé ces derniers temps et pour cause… »

Il s’assit sur le rebord de la fontaine à côté de la jeune femme, se tourna à demi vers elle, le regard fixé sur elle. Il se força un peu à sourire ne voulant pas repenser aux derniers jours.

« Et toi quoi de neuf ? Tu ne t’es pas encore fait arrêter avec tes manifestations ou je ne sais quelles bêtises ? »

Son sourire était sincère, il se moquait d’elle, gentiment bien entendu, il connaissait la propension de Janis pour s’attirer les ennuis. Et malgré son sourire, il savait que la discussion allait irrémédiablement se tourner vers les évènements de ces derniers jours, mais s’il pouvait encore un peu retarder l’échéance c’était déjà ça de prit.

Ses yeux posés sur elle, il voit bien qu’elle semble stressée ou du moins interrogative par rapport à tout ce qu’il se passe. Lui-même n’en sait pas beaucoup plus qu’elle. Il sourit devant le mensonge de la jeune femme, il connaît son penchant pour s’attirer des ennuis, mais il ne dit rien. Il sait qu’elle ne veut pas parler de ça.
Ses inquiétudes, elles sont normales, que peut-il lui dire que d’attendre. Il lui avait fallu un moment à lui pour maitriser son don et pourtant encore aujourd’hui il en vint parfois à revoir ses certitudes. La maîtrise d’un don se fait sur une vie entière, alors que sont deux ans ? Absolument rien, seules la persévérance et la patience lui permettront d’accroitre sa maîtrise.

Mais c’est surtout la dernière phrase qui retient l’attention de William. Elle a conscience qu’un jour prochain elle va devoir agir, comme tous les mutants du centre. Le visage de William s’assombrit quelque peu, il ne veut pas voir ce jour arrivé, mais pourtant il sait que la meilleure chose à faire est de mettre en garde les plus jeunes. Mais il n’a pas le temps de répondre que déjà elle change de sujet.

« Bah c’est surtout que ce métier est fatigant en soi et une petite pause ne fait pas de mal. » Son sourire se veut un peu forcer. « Les soucis, ça va ça vient, non ne t’inquiète pas à mon propos, vraiment tout va bien. Et ne t’en fait pas, tu auras bien assez tôt à donner un coup de main, ne soit pas impatiente. »

Il se gratte la barbe machinalement en repensant à ce qu’elle a dit.

« Tu sais… Ton don… Il faut que tu sois patiente, ça fait seulement deux ans que tu es ici. Il m’a fallu bien plus de temps que ça pour maitriser le mien, et encore je découvre de nouvelles choses tous les jours. Et le jour où l’occasion se présentera… Sache que ta non-maîtrise du don pourrait te sauver la vie. Les mutants expérimentés ont parfois tendance à trop réfléchir au lieu de laisser parler leur instinct, et dans certains cas ce n’est pas bon. Alors, ne t’en fais pas, tu seras utile. »

Il ne peut empêcher de lâcher un léger rire en disant cela.

« J’ai l’impression de parler du beau temps en ces termes. Écoute, je sais que la situation actuellement t’inquiète, elle nous inquiète tous. Après ce qu’il s’est passé, c’est bien normal. Mais tu ne dois pas perdre ton sang-froid. Il arrivera ce qu’il doit arriver, mais jusque-là reste concentrer et continue à étudier. Et surtout sache que tu as bien plus progressé que ce que tu ne le penses. Pense à la personne que tu étais en arrivant ici, ce n’est peut-être pas ton don qui a évolué, mais ta propre personne. »

Il ne peut s’empêcher de sourire, il sait que quelque part ses paroles lui seront utile, dans quelle circonstance, il l’ignore, mais quoi qui l’en soit le jour viendra où sa maitrise sera maximal, mais en attend elle a juste à être patiente et surtout penser à s’amuser un peu.
Devant l’adversité de la situation actuelle il savait qu’il pouvait être difficile de sortir de son cocon et d’affronter ce qui se présente, mais parfois il faut également savoir prendre du recul et penser à autre chose le temps d’un d’instant.

Le geste de Janis est quelque peu gênant, lui qui n’est pas spécialement habitué aux effusions de sentiments, voilà qu’il se retrouve momentanément dans les bras de la jeune femme. Le contact ne dure pas longtemps, mais il sent que cela lui a fait du bien, elle se permet même de faire de l’humour. Or si quelqu’un se permet de rigoler, c’est que tout va bien, non ? Peu importait au final, elle avait eu les réponses qu’elle attendait et un peu d’espoir en prime couplée à de la confiance en soi.

« Je ne crois pas que l’adversité y soit pour quoi que ce soit, tu as toujours été une guimauve. »

Il fait mine d’avoir un air sérieux, mais un sourire apparait bien vite sur son visage. Il se moque d’elle, gentiment bien entendu, mais il sait que les derniers évènements ont beaucoup touché la jeune femme. Et le plus grave c’est que tous ignoraient ce qui va se passer ensuite, personne au Centre ne semble avoir de marche à suivre. Ils continuent tous de faire comme si de rien n’était, avec juste plus de sécurité et d’attention. La tâche de William n’a pas changé, il continue d’arpenter le monde à la recherche de jeune mutant, même si ces dernières semaines le Centre a tenu qu’il reste à New York. Mais concrètement, même les adultes sont aussi délaissés que les enfants. Eux qui sont responsables n’en savent pas plus que ceux qu’ils sont censés protéger.

« Aller viens, allons te changer les idées. Je te laisse choisir… Un café ?  Ne me dit pas une bière c’est encore un peu tôt. » Il sourit franchement, il n’a pas envie de rester ici, Central Park était agréable, mais il commençait à faire froid pour la saison. « Tout sauf du shopping. »